Un neuromédiateur, suspect n°1 de vos acouphènes
Un neurotransmetteur (aussi appelé neuromédiateur) est une molécule chimique qui assure la transmission des messages sur de très petites distances d’un neurone à l’autre, au niveau d’une synapse.
Les neurotransmetteurs sont synthétisés par le neurone qui transmet le message et sont stockés dans des vésicules au niveau du neurone.
Aucune comparaison avec une hormone, produite par une glande ou un tissu spécialisé, qui circule par la voie sanguine et agit à distance pour assurer la transmission de messages entre les organes.
La toxicité du glutamate
L’acide glutamique (ou glutamate) joue un rôle d’excitant.
Depuis octobre 2015 et la publication des travaux d’une équipe de l’Université de Genève (UNIGE), nous savons que le glutamate est l’une des sources d’énergie essentielle pour le cerveau.
Cette découverte pourrait avoir de multiples retombées pour le traitement de nombreuses maladies psychiatriques.
C’est l’acide glutamique qui est utilisé pour synthétiser le GABA au niveau des neurones. Il ne peut être apporté par l’alimentation.
Le glutamate, principal neuromédiateur excitateur rapide du système nerveux central des mammifères (environ 40% des synapses excitatrices) semble jouer un rôle prépondérant dans la survenue d’altérations des synapses du système auditif. Le principal précurseur du glutamate est la glutamine, mais il est aussi synthétisé à partir de l’aspartate dans les cellules gliales par la glutamine synthétase.
Ce neuromédiateur est impliqué dans de nombreuses fonctions :
- la vision,
- le goût,
- et notamment l’audition.
On le retrouve dans toute la cochlée et tout le long du nerf auditif (dans le noyau cochléaire), tout comme de nombreux autres neuromédiateurs : acétylcholine, GABA, dopamine, enképhalines…
Il est présent à la base des cellules ciliées internes et agit sur deux types de récepteurs synaptiques :
- le récepteur NMDA (N-Methyl-D-Aspartate) activé seulement par les fortes intensités sonores
- et le non-NMDA sur lequel le glutamate agit de manière prépondérante.
Les récepteurs sont couplés à un canal sodium qu’ils ouvrent en présence de glutamate.
Ce neurotransmetteur présente toutefois l’inconvénient d’être toxique pour les neurones lorsqu’il est libéré en trop grande quantité suite à des traumatismes sonores, des ischémies cochléaire ou en cas de presbyacousie.
Chez l’animal, on a découvert que de telles situations entraînent la surexpression des récepteurs NMDA impliquant l’apparition de réponses épileptiques traduites au niveau cérébral par des sons spontanés (acouphènes).
Les efférences latérales
La fonction de l’innervation efférente latérale n’est pas encore bien connue contrairement à l’efférence médiane dont le rôle est de contrôler la contraction des cellules ciliées externes.
De nombreux neuromédiateurs ont été découverts :
l’acéthylcholine, le GABA, mais aussi la dopamine (présente uniquement sur les efférences latérales).
Ces médiateurs chimiques modulent l’activité des fibres auditives en inhibant leur activité :
ils diminuent l’activité spontanée des fibres et augmentent le seuil de réponse à une stimulation sonore.
Ce système constitue donc un adaptateur de gain permettant d’ajuster le seuil et la dynamique de réponse des fibres en fonction du niveau d’entrée.
Tout dysfonctionnement de ce système pourrait entraîner un emballement des fibres auditives, un éclatement des dendrites afférentes et favoriser ainsi l’apparition d’acouphènes.
La plasticité synaptique
Un choc excito-toxique provoque la libération excessive de glutamate dans la fente synaptique et induit l’éclatement des terminaisons afférentes lorsque le système efférent de régulation (dopamine, acétylcholine, GABA…) est débordé.
Dans la majorité des cas, ces neurones ont la capacité de se régénérer en formant de nouveaux prolongements dendritiques avec les cellules ciliées internes.
Parallèlement, on observe une modulation de l’expression des récepteurs NMDA dont le blocage par des antagonistes ralentit considérablement la repousse dendritique.
A la base des cellules ciliées internes, de nouvelles connexions synaptiques se forment :
des synapses entre cellules ciliées internes et fibres efférentes apparaissent.
Le glutamate libéré par les cellules ciliées internes agit alors sur une synapse qui n’est plus contrôlée par le système efférent et qui de surcroît surexprime des récepteurs NMDA.
La stimulation augmente le risque d’acouphènes et l’activation des fibres efférentes en retour. Cette double innervation à la base des cellules ciliées internes pourrait être à l’origine d’une boucle de rétroaction positive et permettre d’expliquer l’existence de certains acouphènes périphériques.
L’atteinte des relais centraux
La disparition des acouphènes ne peut être assurée par la section du nerf auditif.
Ainsi, la complexité des acouphènes chroniques est due à la « centralisation » de ce phénomène.
Une atteinte périphérique (cochlée) va pouvoir entraîner des phénomènes de plasticité neuronale centrale et pérenniser les acouphènes.
L’exposition prolongée à de fortes pressions sonores cause une destruction excito-toxique des synapses des cellules ciliées internes et une atteinte de la première rangée de cellule ciliées externes.
C’est la libération excessive de glutamate sous l’effet de la surcharge sonore qui induit cette toxicité auditive.
Normalement, un neurone glutaminergique libère peu de glutamate.
Les systèmes régulateurs (cellules gliales) évitent l’emballement du système en capturant le glutamate libéré et en le recyclant.
En cas d’ischémie ou de sur stimulation sonore importante, l’accumulation de glutamate s’accroît dans la synapse et sature la capacité de régulation des cellules gliales.
La libération massive de glutamate provoque l’ouverture simultanée des canaux sodium et calcium.
L’excès intracellulaire de calcium induit des lésions cellulaires entraînant la mort neuronale.
La production simultanée de radicaux libres détruit les processus respiratoires de la cellule.
Deux types de lésions apparaissent :
- soit l’éclatement de la synapse (processus réversible),
- soit la mort neuronale (apoptose).
Dans le premier cas, les acouphènes sont temporaires car les cellules se régénèrent, dans le second cas, ils sont chroniques.
Les mécanismes de réparation dépendent d’une part de l’atteinte mais aussi d’autres facteurs tels que la santé et l’âge du malade.
Au niveau des cellules ciliées externes, suivant le niveau du bruit, son caractère impulsif et la durée d’exposition, les dommages causés vont être :
- Soit bénins : il apparaît une désorganisation des cils, avec fissures, cassures et plus ou moins disparition. La réparation est possible en quelques jours.
- Soit graves et définitifs : le métabolisme de la cellule est atteint et la cellule disparaît.
Lors de fortes expositions répétées à des bruits impulsifs (pétards, armes à feu…), en plus des dommages citées ci-dessus, s’ajoutent des lésions mécaniques de la membrane basilaire : le canal cochléaire perd de son étanchéité et la fonction cochléaire peut être complètement abolie.
Le bruit produit des effets multiples sur l’organisme au niveau de l’audition mais aussi à d’autres niveaux : en effet une exposition soutenue au bruit perturbe le système nerveux en augmentant la fatigue du sujet exposé.
D’autres effets s’ajoutent tels, la nervosité, l’irritabilité, la perte de vigilance, d’attention, les difficultés de concentration et de mémoire. D’une manière générale, la plupart de nos appareils physiologiques sont perturbés par le bruit et notamment les systèmes endocrinien et immunitaires et au niveau de l’oreille, le bruit entraîne une fatigue auditive.