Comment renforcer naturellement les défenses naturelles de notre organisme ?
Le système immunitaire joue un rôle dans la majorité des pathologies présentes chez un individu.
Sa manifestation la plus fréquente et la plus visible est l’inflammation mais son implication va au-delà. Les pathologies infectieuses résultent d’une faiblesse immunitaire, la cancérisation est un manquement dans le contrôle immunitaire des multiplications cellulaires et de nombreuses maladies trouvent leur origine ou leur manifestation par des phénomènes inflammatoires. Les maladies immunitaires en tant que telles résultent d’un dysfonctionnement primaire de ce système.
L’allopathie trouve souvent ses limites lorsqu’il s’agit de contrôler le système immunitaire. L’usage répandu des anti-inflammatoires se trouve confronté aux nombreux effets secondaires qu’ils possèdent, le développement tumoral est difficilement contrôlable en pratique et les maladies immunitaires possèdent peu de remède spécifique. Il est important de savoir si d’autres méthodes thérapeutiques permettent de dépasser ces limites et de moduler l’action du système immunitaire. La phytothérapie, par son approche thérapeutique globale et l’association des principes actifs au sein des plantes et au sein de la préparation magistrale se présente véritablement comme une médecine complémentaire.
Le raisonnement thérapeutique en phytothérapie : un avantage pour agir sur le système immunitaire
le raisonnement thérapeutique en phytothérapie s’efforce de considérer l’individu dans sa totalité. L’individu est constitué d’un ensemble de systèmes : la commande est faite par le système nerveux central et périphérique, en relation avec le système immunitaire et le système endocrinien. Les effecteurs sont les organes.
Lorsqu’un organe dysfonctionne, c’est tout un système qui est déséquilibré.
Par exemple, un dysfonctionnement des glandes surrénales engendre un dysfonctionnement du système endocrinien. Ce système déséquilibré engendre un dysfonctionnement d’autres organes et
donc d’autres systèmes. On aboutit alors à un déséquilibre complet de l’individu, d’autant
plus important lorsque les maladies sont chroniques.
En phytothérapie on prend en considération les déséquilibres qui touchent les différents systèmes à l’origine de la maladie. Il ne faut donc pas se focaliser sur l’organe défaillant mais revenir à un fonctionnement plus global et rééquilibrer les systèmes pour guérir la maladie.
Stimulation de l’immunité anti-infectieuse
Stimulation de l’immunité antibactérienne
Echinacea purpurea et Panax ginseng diminuent les infections bactériennes.
Les polysaccharides de l’Echinacée augmentent la cytotoxicité des polynucléaires envers les staphylocoques (BORCHERS et al., 2000 citant ROESLER).
De plus ils augmentent la survie des souris infectées par Listeria monocytogenes, car les polynucléaires et les macrophages étaient activés (BORCHERS et al., 2000 citant STEINMULLER et ROESLER). De même SULLIVAN et al. (2008) ont montré que les polysaccharides diminuent la charge bactérienne en L.monocytogenes en engendrant une cascade d’activation des macrophages. Cette activation se faisait via les TOLL récepteur (TLR4) pour activer NFκB, ou via la Jun-kinase (JNK) ou p38 pour activer un autre facteur de transcription, AP-1.
Panax ginseng module la réponse immunitaire de l’organisme pendant une infection afin d’en diminuer la gravité. AHN et al. (2006) ont montré que le ginsan protège les souris d’un sepsis du à Staphylococcus aureus en diminuant l’inflammation aiguë en début d’infection et en augmentant les capacités antimicrobiennes pendant les phases suivantes. La synthèse des cytokines inflammatoires (TNFα, IL-1β, IL-6, IFNϒ, IL-12 et IL-18) était diminuée pendant la phase aiguë du sepsis. De même, l’expression des TLR était réduite sur les macrophages, empêchant la reconnaissance de l’antigène. Enfin l’activité phagocytaire des macrophages augmentait une fois la phase inflammatoire passée.
Echinacea purpurea, Glycyrrhiza glabra, Arctium lappa et Plantago lanceolata agissent également directement sur les microorganismes (action bactéricide, bactériostatique et anti-adhésive) et permettent donc de diminuer les infestations bactériennes (WICHTL et ANTON, 2001, FAIVRE, 2012, BORCHERS et al., 2000, TANAKA et al., 2001, MOSKALENKO, 1986 et IESV, 2012).
Stimulation de l’immunité antivirale
Echinacea purpurea, Glycyrrhiza glabra et Plantago lanceolata ont une activité antivirale.
In vitro, les polysaccharides de l’Echinacée ont une activité contre l’Herpès simplex (WICHTL et ANTON, 2001). Ils sont également actifs contre le virus Influenza. Les polysaccharides ont un effet protecteur antiviral de type interféron sur des fibroblastes en culture (BARRET, 2003 citant SKWAREK).
L’acide caféique et l’acide cichorique possèdent une activité antivirale curative et préventive sur des cellules en culture. Leur action dure 24 à 48 heures (INSTITUT EUROPEEN DES SUBSTANCES VEGETALES, 2012). De plus, les extraits inhibent la réplication virale. SENCHINA et al. (2010) a montré que les extraits d’E.purpurea induisent faiblement la production de la guanylate binding protein (GBP), enzyme clé dans l’immunité anti-infectieuse, et augmentent la quantité de la iNOS par les macrophages infectés par un Herpès virus. L’activation de la iNOS témoigne de la réponse inflammatoire déclenchée par l’infection au sein de la cellule. BARRET (2003) citant EICHLER et KRUGER a indiqué que les extraits d’E.purpurea augmentent la présentation d’antigènes viraux par des cellules infectées. Lorsqu’il citait SEE, il a rappelé qu’elle augmente la cytotoxicité médiée par les anticorps et la cytotoxicité par les NK contre l’Herpès virus. Echinacea purpurea active donc à la fois l’immunité innée, première défense de l’organisme et l’immunité cellulaire pour lutter contre les cellules
infectées par les virus.
Glycyrrhiza glabra a une activité immunostimulante locale sur les appareils oto-rhino-laryngologique (ORL) et digestif (FAIVRE, 2012 et BRUNETON, 1999). Elle induit la synthèse de cytokines activant la voie Th1, telles qu’IL-18 et Il-12 et la synthèse d’IFNϒ par les LT. IL-18 induit la synthèse d’IFNϒ, et cet interféron, de même qu’IL-12, a un rôle antiviral. Wamine (2011) a indiqué de plus que la Réglisse stimule la sécrétion d’IFNα par les cellules épithéliomuqueuses. Cet interféron a également un rôle antiviral, et il active les cellules de l’immunité.
La Réglisse peut être utilisée dans le cas de pathologies de l’appareil respiratoire (INSTITUT EUROPEEN DES SUBSTANCES VEGETALES, 2012):
- En phase aiguë, dans le traitement des infections respiratoires telles que les angines,
les pharyngites et la grippe,
- Infections virales (FIORE et al., 2008),
- Toux.
La Réglisse peut également être utilisée dans le cas de désordres immunitaires (INSTITUT EUROPEEN DES SUBSTANCES VEGETALES, 2012) comme lors d’Herpès virose ou de mononucléose. CHIANG et al. (2003) ont montré que l’acide caféique du Plantain lancéolé a une forte activité antivirale contre les Herpès virus et les Adénovirus. L’acide chlorogénique agit uniquement sur les Adénovirus en agissant sur les stades de multiplication des virus.
Stimulation de l’immunité antifongique
Différentes études ont prouvé l’efficacité d’Echinacea purpurea, Glycyrrhiza glabra et Arctium lappa contre une infection à Candida albicans. BARRET (2003) citant MÖSE a indiqué que les extraits d’Echinacea purpurea stimulent la phagocytose de C.albicans par les macrophages. En citant STEINMULLER, il a précisé que les alkylamides augmentent la survie des souris et diminue le nombre d’infectés (FAIVRE, 2012).
En citant COEUGNIET, il a indiqué que les extraits diminuent le nombre de rechutes aux infections vaginales à C.albicans chez la femme lors du traitement par voie orale et topique.
La glycyrrhizine de Glycyrrhiza glabra augmente la résistance des souris MAIDS à l’infection par Candida albicans (UTSUNOMIYA et al., 2000). Les souris MAIDS sont des souris cent fois plus sensibles auxinfections que les souris normales car infectées par un virus leucémique.
Elle agit en induisant des LT CD4+ qui suppriment les cytokines IL-4 et IL-10 produites par la voie Th2. Elle active donc la voie cellulaire.
La Réglisse peut également être utilisée dans le cas de désordres immunitaires (INSTITUT EUROPEEN DES SUBSTANCES VEGETALES, 2012) et en prévention des candidoses récidivantes.
De même, MOSKALENKO (1986) a montré que les alkylamides d’Alappa agissent contre Candida albicans.
Immunité antiparasitaire
Echinacea purpurea a une action contre les parasites unicellulaires dont Trichomonas (FAIVRE, 2012). Les extraits d’E.purpurea diminuaient l’invasion des cellules épithéliales par Eimeria tenella, et agissent donc comme un anticoccidien (BURT et al., 2013).
L’Echinacée est utilisée pour stimuler les mécanismes de défense de l’immunité innée et adaptative, d’oùson rôle anti-infectieux développé.
Echinacea purpurea est indiquée en cas de pathologie de la muqueuse ORL et de l’appareil pulmonaire :
- Infections ORL et infections de la sphère broncho-pulmonaires : phlegmon, abcès dentaires, sinusites (INSTITUT EUROPEEN DES SUBSTANCES VEGETALES, 2012, BARNES et al., 2005),
- Prévention et traitement des infections des voies respiratoires hautes (BARNES et al., 2005) : pathologies respiratoires bactériennes (pasteurellose, bronchite) ou virales.
L’Echinacée diminue le risque d’avoir un rhume, diminue le risque de réinfection, diminue la durée des symptômes par rapport aux antibiotiques seuls et diminue la sévérité des symptômes de 10 à 40% (BARRET, 2003, BORCHERS et al., 2000).
Echinacea purpurea est indiquée en cas de pathologie de l’appareil uro-génital :
- cystites récidivantes à colibacille, urétrites, infections prostatiques, infections génitales récurrentes (INSTITUT EUROPEEN DES SUBSTANCES VEGETALES, 2012).
Echinacea purpurea est indiquée en cas de pathologie immunitaire :
- séquelles de maladies ganglionnaires récurrentes et chroniques (INSTITUT EUROPEEN DES SUBSTANCES VEGETALES, 2012),
- infections récidivantes (dues à un déficit immunitaire).
Echinacea purpurea est indiquée en cas de pathologie dermatologique :
- infections cutanées : candidoses
Stimulation de l’immunité antitumorale
Panax ginseng et Viscum album montrent une action antitumorale.
Le facteur de transcription NFκB est activé dans certains cancers et permet aux cellules tumorales de résister aux chimiothérapies. Les ginsénosides Rg3 inhibent ce facteur de transcription et permettent donc d’augmenter la sensibilité des cellules tumorales aux traitements antitumoraux (KIM et al., 2010).
Dans les cellules tumorales, ces ginsénosides augmentent l’expression de gènes impliqués dans l’apoptose tels que la caspase 3 et la caspase 9. De même, ils sous-expriment les gènes d’une protéine inhibitrice de l’apoptose et des protéines régulatrices du cycle cellulaire. MAI (2012) a également montré que le ginsénoside F2 induit l’apoptose de cellules cancéreuses en activant la voie intrinsèque de l’apoptose. Panax ginseng induit donc l’apoptose des cellules cancéreuses. Par ailleurs il inhibe la prolifération des cellules tumorales.
Le Gui est également pro-apoptotique (HEGDE, 2010). DUONG VAN HUYEN et al. (2003) ont montré que V.album quercus et malus induit la mort cellulaires de manière dose-dépendante et inhibe la prolifération des lymphoblastes T et des monocytes. V.album pinus n’a pas ces actions. Les lignées de cellules B sont par contre résistantes à cette activité cytotoxique du Gui. RIBEREAU-GAYON et al. (1997) ont démontré que le Gui déclenche l’apoptose par perforation de la membrane et protrusion du contenu cytoplasmique. De plus, ML III (Mistletoe lectin III) est beaucoup plus cytotoxique que MLII et que MLI.
V.album quercus active la voie mitochondriale lors de l’apoptose (via le cytochrome C), tandis que V.album malus intervient via la voie du récepteur de mort (caspase 8) (HARMSMA et al., 2006) (Figure 46).
DUONG VAN HUYEN et al. (2006) ont expliqué que les lectines du Viscum album quercus inhibent la croissance tumorale, en relation avec une prolifération des splénocytes et une augmentation de la sécrétion d’IL-12. IL-12 oriente la réponse immunitaire vers la voie Th1, donc vers la réponse cellulaire. Cette cytokine active la cytotoxicité des NK et des LT, pour aboutir à la destruction de la tumeur. V.album pinus et malus activent la voie Th1 et plus particulièrement l’activité antitumorale des macrophages (MOSSALAYI et al., 2006 et HEGDE, 2010). Le monoxyde d’azote serait impliqué dans ce rôle activateur du Gui. Ce rôle pro-inflammatoire du Gui et l’activation des LT permet d’outrepasser l’environnement
immunodéprimé autour de la tumeur.
De même, ELURU et al. (2009) ont montré que V.album quercus inhibe l’angiogénèse (HEDGE,2010) et diminue la densité vasculaire. L’angiogenèse joue un rôle essentiel dans le développement tumoral et la dispersion métastatique de la tumeur. Elle consiste en une multiplication des cellules endothéliales, une augmentation des molécules d’adhésion et la production de facteurs angiogéniques. De plus, les lectines provoquaient l’apoptose des cellules endothéliales (DUONG VAN HUYEN et al., 2002).
Le Gui freine les cycles cellulaires (HEGDE, 2010). HARMSMA et al. (2006) ont montré que le V.album inhibe les cycles cellulaires dans les stades précoces, pour aboutir à une apoptose de manière concentration-dépendante. Pour cette activité, V.album quercus est plus puissant que V.album malus. La sensibilité des cellules tumorales est variable selon le type de Viscum et le type de tumeur. Le Viscum album a donc un rôle antiprolifératif en inhibant la croissance des cellules malignes et leur prolifération.
Le Viscum album a donc un rôle antitumoral grâce à l’induction de l’apoptose, par l’inhibition de l’angiogénèse et par son rôle immunomodulateur. Le Gui est ainsi utilisé comme traitement complémentaire lors de cancérothérapie. Il est utilisé en parallèle de la radiothérapie et de la chimiothérapie pour améliorer la tolérance au traitement, la qualité de vie et augmenter les chances de survie (HEGDE, 2010).
Propriétés adaptogènes du Ginseng et de la Rhodiole
Panax ginseng et Rhodiola rosea ont des propriétés adaptogènes.
Une plante adaptogène améliore la capacité d’adaptation de l’organisme vis-à-vis des perturbations externes ou internes (WICHTL et ANTON, 2001) : elle stimule la résistance non spécifique de l’organisme (BRUNETON, 1999).
La Commission Européenne et l’Organisation mondiale de la Santé reconnaissent que le Ginseng tonifie l’organisme des personnes fatiguées ou affaiblies, rétablit la capacité de travail physique et intellectuel et aide les convalescents à reprendre des forces. Selon BRUNETON (1999), la racine de Panax ginseng est un stimulant du système nerveux central, elle augmentait la résistance à la fatigue et au stress, améliorait la mémoire, et possède un effet anabolisant.
Mais selon VOGLER et al. (1999), l’efficacité du Ginseng sur l’amélioration des performances psychomotrices et cognitives, de même que l’immunomodulation, n’est toujours pas établie.
Le Ginseng est ainsi utilisé en cas de stress chronique, chez l’animal âgé, en préparation d’une activité sportive intense, en convalescence ou lors d’état post-infectieux. Cette plante doit être administrée sur une durée assez longue (INSTITUT EUROPEEN DES SUBSTANCES VEGETALES, 2012, WAMINE, 2011 et WICHTL et ANTON, 2001).
La Rhodiole a également des propriétés adaptogènes. PANOSSIAN et al. (2009) ont montré que Rhodiola rosea mime l’action d’une protéine inhibitrice de l’expression de la NO syntase II. Cette protéine interagit également avec les récepteurs aux glucocorticoïdes. La Rhodiole inhibe donc l’action des molécules présentes lors de stress et permettait à l’organisme d’être plus performant.
La Rhodiole est plutôt indiquée pour les troubles de l’adaptation avec anxiété, les dépressions, les comportements addictifs, les maladies neurodégénératives et lors de préparation d’une épreuve sportive ou de récupération (INSTITUT EUROPEEN DES SUBSTANCES VEGETALES, 2012).
Conclusion : la phytothérapie est un outil complexe utilisable pour moduler le système immunitaire. Les plantes présentées contiennent des principes actifs qui peuvent stimuler ou déprimer certains acteurs du système immunitaire, avec des actions parfois contraires au sein d’une même plante.
Les relations entre nutrition et immunité ont été très étudiées. Malgré un nombre important de publications dans ce domaine, des inconnues persistent, liées à la complexité de la machinerie immunitaire et de sa régulation et à la difficulté d'appréhender les phénomènes nutritionnels. Mais le fait principal réside dans l'intrication profonde entre immunité et état nutritionnel: toute carence nutritionnelle profonde entraîne un déficit immunitaire, et toute stimulation immunitaire forte ou prolongée s'accompagne d'hypercatabolisme et de dénutrition sévère.
Chez l'enfant, toute carence protéique est une cause majeure de déficit de l'immunité cellulaire, et entraîne une mortalité infectieuse.